La prise de conscience de la dette climatique par les responsables politiques

Lors de son discours de passation des pouvoirs avec Gabriel Attal, Michel Barnier a souligné l’importance de « dire la vérité sur notre dette financière » ainsi que sur notre « dette écologique ». Cette déclaration résonne fortement à l’approche de la présentation du projet de loi de finances pour 2025 en conseil des ministres le 10 octobre. L’objectif est clair : concilier les réalités économiques et environnementales. Mais comment réussir cet exercice délicat ?

Un budget contraint par la dette et le déficit

Selon le projet de loi de finances pour 2025, la dette de la France s’élève à 110 % du PIB et le déficit à 6,1 % du PIB. Dans ce contexte, le gouvernement doit faire des choix difficiles pour réduire les dépenses. Malheureusement, cela se traduit par des coupes dans les budgets alloués à la transition écologique. Par exemple, MaPrimeRénov’ et le Fonds vert pour les collectivités subiront des réductions importantes.

Le coût de l’inaction sur le climat : peut-on le mesurer ?

Une des principales difficultés dans cette conciliation entre économie et environnement réside dans la question suivante : peut-on réellement mettre une valeur sur le coût de l’inaction sur le climat ? Cette interrogation est ancienne puisque dès les années 1970, les économistes se sont penchés sur la question en utilisant l’approche coût-bénéfice.

Les travaux pionniers de William Nordhaus

En 2018, William Nordhaus s’est vu décerner le « Nobel » d’économie pour ses recherches sur la question du coût des dommages environnementaux en comparaison avec celui de l’action nécessaire pour les éviter. Il estime notamment que si la température augmentait de 6°C, cela ne se traduirait que par une baisse de 10% du PIB mondial. Selon lui, la cible optimale pour limiter le réchauffement climatique devrait être de 4 °C, ce qui est bien loin de la fourchette de 1,5 à 2 °C préconisée par les scientifiques.

Des limites à cette approche économique

Pourtant, de plus en plus de critiques s’élèvent contre cette approche économique du climat. En effet, elle ne prend pas en compte les dommages irréversibles et les coûts humains et sociaux qui en découlent. De plus, elle repose sur le principe que la croissance économique est un objectif prioritaire et qu’il est possible de trouver un équilibre entre économie et environnement. Or, de nombreux scientifiques mettent en garde contre le fait que le modèle de croissance actuel est insoutenable et qu’il contribue directement au réchauffement climatique.

Des exemples concrets du coût de l’inaction sur le climat

Malgré ces limites, il est possible de constater, avec des exemples concrets, le coût de l’inaction sur le climat. Les phénomènes climatiques extrêmes, tels que les ouragans, les inondations et les sécheresses, ont un impact financier considérable. Selon un rapport de la Banque mondiale, ces évènements ont coûté environ 520 milliards de dollars chaque année entre 2000 et 2019, une somme qui devrait encore augmenter avec le réchauffement climatique.

De plus, les industries les plus impactées par le changement climatique sont également les plus coûteuses en termes de dommages environnementaux. L’agriculture, l’élevage, la pêche et la foresterie, qui représentent environ un tiers de l’économie mondiale, sont directement affectées par des phénomènes tels que les sécheresses, les inondations ou les changements de température. Selon les estimations de la Banque mondiale, ces dommages pourraient coûter jusqu’à 3,2% du PIB mondial d’ici 2030.

Les avantages d’une action précoce sur le climat

À l’inverse, une action précoce à grande échelle pour limiter les émissions de gaz à effet de serre pourrait engendrer des avantages économiques considérables. Un rapport des Nations Unies estime que les bénéfices économiques potentiels d’une telle action pourraient atteindre 26 000 milliards de dollars d’ici 2030, avec la création de millions d’emplois verts. De plus, une transition vers une économie plus durable pourrait également stimuler l’innovation et encourager la croissance à long terme.

Une prise de conscience qui doit se traduire dans les budgets

Face à ces enjeux, il est essentiel que les gouvernements prennent pleinement conscience du coût de l’inaction sur le climat. Cela doit se traduire par une réorientation des budgets vers des politiques visant à lutter contre le changement climatique et à promouvoir une économie plus durable. Il est également crucial de prendre en compte les coûts environnementaux dans les décisions économiques et de mettre fin aux subventions aux industries polluantes.

Conclusion

Le budget 2025 présente donc un défi de taille pour concilier les réalités économiques et environnementales. Face à une dette et un déficit importants, il est tentant pour les gouvernements de faire des coupes dans les budgets alloués à la transition écologique. Pourtant, l’inaction sur le climat a un coût considérable, que ce soit en termes financiers ou humains. Une prise de conscience plus importante est nécessaire pour orienter les décisions budgétaires vers une économie plus durable.

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