L’inquiétude pour l’environnement ne se traduit pas toujours en action politique, souligne François Gemenne

Des études et sondages montrent qu’il n’y a pas de corrélation entre l’inquiétude pour l’environnement et la priorité politique accordée à cette question.

La question du changement climatique suscite de plus en plus d’inquiétude à travers le monde. De nombreux travaux de recherche et sondages d’opinion montrent que la majorité des citoyens sont préoccupés par l’état de l’environnement et que le climat est généralement cité comme la principale préoccupation environnementale. Cependant, cette inquiétude ne se traduit pas toujours en action politique. Ainsi, le professeur François Gemenne remet en question l’idée selon laquelle il faudrait que les citoyens soient directement touchés par les conséquences du changement climatique pour prendre conscience de son urgence et agir.

Les vertus pédagogiques de la catastrophe remises en question

Des considérations morales et une réalité qui ne coïncident pas

L’idée que les catastrophes sont nécessaires pour agir contre le changement climatique est dangereuse et inefficace.

De nombreux experts et politiques ont avancé l’argument selon lequel il faudrait que les gens soient personnellement touchés par les impacts du changement climatique pour qu’ils prennent conscience du danger et agissent en conséquence. Cependant, Francois Gemenne souligne que cette notion est morale et désespérante car elle sous-entend que les individus ne sont capables d’agir que lorsqu’ils sont directement affectés. En outre, elle ne correspond pas à la réalité. Par exemple, lors de son séjour à La Nouvelle-Orléans en 2007, le professeur a observé que malgré le traumatisme causé par l’ouragan Katrina en 2005, les électeurs de Louisiane ont élu, quelques mois plus tard, Bobby Jindal, un climato-sceptique notoire. Cette situation s’explique notamment par la recherche de coupables, que le discours populiste et poujadiste de Bobby Jindal leur a fournis.

Pas de corrélation entre inquiétude pour l’environnement et priorité politique accordée à cette question

Une étude internationale révèle des résultats surprenants

La France ne fait pas partie des pays les plus inquiets mais estime que l’écologie est une priorité politique.

En 2020, une étude commanditée par EDF et réalisée par Ipsos a été menée dans 29 pays du monde sur l’inquiétude face au changement climatique et la priorité politique accordée à cette question. Les résultats sont surprenants : bien que le niveau d’inquiétude soit élevé partout dans le monde et augmentent avec l’élévation des températures, il n’y a pas de corrélation directe entre ce niveau d’inquiétude et la priorité politique accordée à l’écologie. Ainsi, les pays où les citoyens se disent les plus inquiets ne sont pas nécessairement ceux qui considèrent que l’écologie doit être une priorité politique. Par exemple, la Chine est l’un des pays où les citoyens estiment que l’écologie doit être une priorité politique, alors que le niveau d’inquiétude y est relativement bas. En France, l’écologie est également considérée comme une priorité politique, mais les Français ne font pas partie des populations les plus inquiètes. En revanche, la Turquie est un pays où l’inquiétude est forte mais où l’écologie n’est pas considérée comme une priorité politique.

Ne pas compter sur les catastrophes pour agir

La capacité à oublier, un frein à l’action

Les catastrophes ne sont pas une solution pour nous faire prendre conscience de l’urgence climatique.

Une des principales conclusions de l’étude menée par Ipsos réside dans le fait que les catastrophes naturelles ne constituent pas un facteur déterminant pour pousser les citoyens à agir contre le changement climatique. En effet, même lorsque des événements climatiques marquants se produisent, ils ne sont pas toujours associés au changement climatique dans l’esprit des gens. De plus, avec le temps, les catastrophes en viennent à être oubliées et n’ont pas une influence significative sur la prise de conscience et l’action politique. Ainsi, il ne faut pas attendre d’être touchés directement par les conséquences du changement climatique pour agir, car cela serait un comportement inefficace et dangereux.

Vers une prise de conscience collective et une action commune

Un appel à agir selon nos intérêts immédiats

Il est temps de changer de mentalité et de prendre des mesures pour préserver l’environnement.

Pour François Gemenne, la clé pour agir contre le changement climatique repose sur la prise en compte de nos intérêts immédiats. En effet, bien que les enjeux environnementaux puissent sembler abstraits et lointains, leurs conséquences peuvent être ressenties dans notre quotidien. Ainsi, il est primordial de prendre conscience que nos actions individuelles peuvent avoir un impact à long terme sur l’environnement et sur notre propre vie. Changer nos habitudes et agir collectivement pour préserver l’environnement doit devenir notre priorité, indépendamment de notre niveau d’inquiétude. Il est temps de rompre avec l’idée que les catastrophes sont nécessaires pour que nous réagissions et de prendre notre avenir en main.

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